1) DE LA CONSTITUTION DES SURETES PORTANT SUR L'IMMEUBLE...
Très prisée par les créanciers qui la considèrent comme la garantie la plus crédible, l'hypothèque est une sûreté qui fascine et qui inquiète. Cette garantie, en pratique la plus réclamée par les créanciers du secteur bancaire et financier, fascine au moment de sa constitution, parce qu'elle porte sur la terre, élément le plus stable de la fortune.
En même temps, elle les inquiète au moment de sa réalisation (à cause des nullités), parce que compte tenu de la valeur qu'attache le législateur africain à la terre et à tous ses accessoires, la constitution de cette sûreté a été strictement encadrée pour mettre le débiteur, constituant de l'hypothèque, à l'abri non seulement de la « mauvaise foi » du créancier, mais également de la faute de ce dernier.
L'Acte Uniforme portant organisation des Sûretés (AUS), en ses articles 190 et suivants constitue le texte de base en matière de réglementation de l'hypothèque. Mais ce texte doit être complété sur certains points par les législations nationales auxquelles il a expressément renvoyé (voir par exemple les articles 195, 196, 199, 201, 205, etc.), notamment les lois nationales relatives aux régimes fonciers et domaniaux. En plus il faut ajouter les dispositions relatives à la saisie immobilière contenues dans les articles 246 à 334 de l'Acte Uniforme sur les Procédures Simplifiées de Recouvrement et de Voies d'Exécution (AUPSRVE) , et les dispositions contenues dans l'Acte uniforme révisé sur les procédures collectives d'apurement du passif (AUPC) pour ce qui est de la constitution d'une hypothèque après l'ouverture d'une procédure collective ou du sort du créancier bénéficiaire d'une hypothèque en cas d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens contre le débiteur.
En outre, l 'hypothèque semble avoir pour seul assiette les immeubles immatriculés. Mais e n réalité, et compte tenu du contexte social et foncier des États parties à l'OHADA où près de 80% des immeubles ne sont pas immatriculés, certaines pratiques tendent à favoriser sur ceux-ci la constitution des hypothèques conservatoires ou provisoires.
Visant à sécuriser les droits du créancier, la constitution d'hypothèque fait partie de la catégorie juridique des actes de disposition, c'est-à-dire les actes qui changent de façon importante la composition du patrimoine, requérant la plus grande vigilance et diligence. C'est cette vigilance et diligence qui semblent manquer à certains créanciers de l'espace de l'OHADA (notamment certains établissements financiers et bancaires) dans la constitution et le suivi des hypothèques, ce qui ouvre la voie royale aux actions en nullité d'hypothèque devant les cours et tribunaux.
L'exploitation de la jurisprudence des Etats parties à l'OHADA ainsi que celle de la Cour Commune de Justice et d'Arbitrage révèle en effet une insuffisante connaissance des réflexes et bonnes pratiques indispensables à la bonne mise en œuvre des dispositions des articles 190 à 223 de l'Acte uniforme sur les sûretés.
De même, les difficultés relevées en pratique dans la mise en œuvre des règles régissant les hypothèques concernent principalement les hypothèques conventionnelles. Par ailleurs, on constate que les hypothèques forcées légales et hypothèques forcées judiciaires regorgent d'énormes secrets et des subtilités dont la portée opérationnelle et pratique semble encore méconnue par les professionnels du droit et du secteur bancaire. Ainsi, compte tenu de la valeur économique de l'hypothèque, sa constitution et sa mise en œuvre opérationnelle appelle la plus grande rigueur, une précision d'horloger et une vigilance à toute épreuve. La moindre erreur peut en effet entraîner la nullité de la garantie et exposer le créancier aux aléas de la situation, peu enviable, du créancier chirographaire.
A cela s'ajoutent des difficultés pratiques observées à la fois quant à l'acclimatation des législations nationales aux actes uniformes et quant aux particularités procédurales de chaque pays (par exemple : le pouvoir de l'un des époux ou du mari de constituer seul une hypothèque sur les immeubles de la communauté varie suivant les différentes législations nationales).
2) ... A LA REALISATION
S'agissant de la saisie immobilière proprement dite, elle est communément perçue comme une procédure lourde, complexe, formaliste, et sérieusement redoutée par les praticiens, parce qu'elle appelle l'élaboration d'actes rigoureusement réglementés par l'AUPSRVE de l'OHADA.
Visant la vente forcée de l'immeuble du débiteur ou, le cas échéant, du tiers détenteur, en vue de la distribution de son prix, elle est empreinte d'un formalisme strict qui a pour but de concilier les intérêts des différentes parties prenantes qui sont le débiteur d'abord, car l'immeuble est par excellence l'élément stable de la fortune dans l'espace de l'OHADA, il convient donc de le sauvegarder où, à tout le moins, de s'assurer que la vente sera faite dans les meilleures conditions pour en tirer le prix maximum et les tiers ensuite, qui peuvent avoir des droits sur l'immeuble et qui ne peuvent être sacrifiés parce qu'un débiteur n'acquitte pas ses obligations.
C'est pour faire prévaloir ces considérations que le législateur OHADA a imposé de nombreuses formalités substantielles prévues notamment à l'article 246 de l'Acte Uniforme portant organisation des Procédures Simplifiés de Recouvrement et des Voies d'Exécution (AUPSRVE).
Même si le principe « pas de nullité sans grief » est admis par l'article 297 al 2 de l'AUPSRVE, il faut dire que cette procédure appelle une grande rigueur, précision, vigilance et diligence. En effet, la moindre erreur peut entrainer l'annulation de toute la procédure entreprise et exposer à la mise en œuvre de la responsabilité civile professionnelle des personnes qui interviennent dans cette procédure (avocats, huissiers instrumentaires, etc...).
Parmi les actes à accomplir figure en bonne place la rédaction du cahier des charges . Ce document qui précise les clauses et conditions sous lesquelles la vente par expropriation forcée de l'immeuble sera conduite est particulièrement encadré quant à son élaboration et le régime de son dépôt au Greffe. L'article 267 de l'AUPSRVE prévoit pas moins de 10 mentions obligatoires à peine de nullité, d'où l'intérêt pratique de mieux cerner son régime et les réflexes utiles afin de ne pas tomber sous le coup des irrégularités de procédure. De plus, il faut savoir agencer les différentes dates (les délais d'action), régler les problèmes matériels liés à la signification.
Par ailleurs, l'expérience des prétoires laisse apparaître certaines difficultés dans la mise en œuvre des nouveaux modes de réalisation des sûretés (introduite par la réforme du droit des sûretés par le législateur de l'OHADA en décembre 2010) affectant l'immeuble. Il s'agit principalement de la pratique de l'attribution conventionnelle (ou pacte commissoire) et de l'attribution judiciaire de l'immeuble.
En effet, certaines juridictions inscrivent les procédures d'attribution juridictionnelle de l'immeuble au rôle de l'audience de vente sur saisie immobilière, ce qui interpelle sur la nécessité de bien maîtriser le régime spécifique de cette procédure particulière qui ne doit pas être confondue avec la saisie immobilière.
C'est pour apporter des réponses à ces difficultés que connaissent les praticiens en matière de saisie immobilière et celles liées aux nouveaux modes de réalisation des suretés que le cabinet spécialisé dans la formation en Droit OHADA organise ce séminaire international.
Un accent particulier sera mis sur les réponses et les bons réflexes à adopter en face des problèmes rencontrés entre la rédaction de la convention constitutive d'hypothèque et le moment de l'adjudication de l'immeuble, les débiteurs invoquant fréquemment à ce niveau de la vie de l'hypothèque, sa nullité ou sa défectuosité.